L’odorat
Dans un petit bout de nature, couchez-vous à plat-ventre et reniflez le sol. Vous serez surpris(e) de voir à quel point il dégage des odeurs subtiles. C’est un véritable cocktail odoriférant. Prenez le temps de bien humer, puis déplacez-vous de quelques mètres, et recommencez. Vous trouverez à coup sûr des odeurs complètement (ou au moins partiellement) différentes.
L’ouïe
Pour développer la sensibilité de vos oreilles, rien de tel qu’une période d’immersion prolongée en forêt, dans le silence. Après seulement quelques jours, on s’aperçoit rapidement que nos oreilles deviennent plus sensibles.
Quel que soit le niveau de sensibilité de vos oreilles, il existe des moyens efficaces d’amplifier les sons. Nous, humains, avons des oreilles très petites en comparaison de la plupart des animaux. Les oreilles d’un renard ou d’un cerf sont proportionnellement immenses par rapport à la taille de leur tête. Cette grande dimension fait office de caisse de résonance, et amplifie les sons, de la même manière que le corps d’un violon, par exemple.
Pour palier à la petite taille de nos « caisses de résonance », nous pouvons utiliser nos mains ou d’autres objets pour aider à la réverbération des ondes sonores.
Dans un coin silencieux, marchez vers une source sonore régulière (un ruisseau, par exemple). Marchez en tendant l’oreille. Dès que vous commencez à entendre votre ruisseau, arrêtez-vous, et faites demi-tour jusqu’à ce que vous ne l’entendiez plus. Dès que vous cessez de l’entendre, retournez-vous vers lui, et placez vos doigts derrière vos oreilles, de manière à les décoller volontairement de votre crâne tout en formant une sorte de cornet avec vos mains. Écoutez bien, vous entendrez le ruisseau à nouveau. Cette méthode toute simple vous permet d’amplifier les sons de manière significative.
Ensuite, sans vous déplacer, et sans enlever vos mains de derrière vos oreilles, orientez votre tête de manière à trouver l’angle où le bruit vous parviendra le plus clairement. Cela vous indiquera la direction du ruisseau avec une précision impressionnante.
Ensuite, toujours sans vous déplacer, et sans bouger vos mains, penchez la tête sur le côté, puis élevez et abaissez la tête (comme quand vous dites « oui »). Vous pourrez ainsi déterminer la position exacte de la source sonore (non plus seulement sa direction, mais aussi sa hauteur et même sa distance). Évidemment, ça demande un peu d’entraînement ;^).
Pour amplifier encore plus les sons qui parviennent à vos oreilles, vous pouvez augmenter la taille de vos mains en utilisant n’importe quelle surface lisse : bouts de carton, d’écorce de bouleau, ou de cuir…
Le goût
Demandez à quelqu’un de vous préparer quelques aliments dont le goût se ressemble (par exemple, une tangerine, une orange et une clémentine, ou encore quelques pommes différentes). Sans les regardez, essayer de les reconnaître en les mangeant.
Lorsque vous mangez, surtout un plat de qualité, essayez de retrouver les ingrédients, épices, fines herbes…
Le toucher
Sortez, et ramassez quelques cailloux de taille à peu près semblable. Prenez-en cinq ou six, qui se ressemblent mais de couleur et de texture différente. Choisissez-en un, votre préféré, et manipulez-le pendant un long moment. Regardez-le sous toutes ses coutures. Palpez-le, faites bien connaissance avec lui. Une fois que vous aurez l’impression de bien le connaître, placez-le avec tous les autres dans un petit tas. Mélangez-les bien, et, les yeux fermés, retrouvez-le. Vous verrez, vous réussirez probablement du premier coup. Vous pouvez répéter ce genre d’exercices avec plein de types d’objets différents.
Pour développer les capacités tactiles de vos pieds, sortez faire une balade pieds nus. Marchez en ville, ou mieux, en forêt, sans vos chaussures. Prenez le temps de sentir le terrain, la douceur de certaines pierres, les picotements de l’herbe, etc. Marchez dans le sable, et essayez de sentir chaque grain de sable sous vos pieds. Marchez doucement !!!
Pour étendre l’expérience à tout votre corps, trouvez un endroit calme, à l’abri du vent. Enlevez vos vêtements (rien ne vous oblige à être complètement nu(e), mais plus vous exposez de peau, et plus l’exercice sera efficace. Un maillot de bain fait très bien l’affaire…), et fermez les yeux. Vous verrez, même dans un endroit apparemment sans aucun vent, l’air bouge sans cesse. Essayez de déterminer sa direction, sa vitesse, sa texture, sa température, son degré d’humidité…
La vue
On voit souvent, sur les photos historiques des grands chefs indiens, leur regard magnifique, qui semble perdu dans le lointain, comme une profonde contemplation d’une chose qui nous échappe… En fait, sur ces photos, ils regardent tout simplement le monde en utilisant leur vision périphérique, il faut relever la tête, fixer un point imaginaire un peu surélevé par rapport à l’horizon, et éviter de laisser nos yeux faire le point sur quoi que ce soit. Ensuite, par un simple effort de concentration (au début), on réussit peu à peu à inclure toute la périphérie de notre champ de vision dans notre sphère visuelle.
Cette façon de regarder a ses avantage et ses inconvénients. Elle ne permet pas de voir quoi que ce soit avec une grande précision, mais elle permet d’avoir une vue d’ensemble surprenante, et de repérer immédiatement tout mouvement dans un rayon de 180 degrés ou plus. De même, cette façon d’utiliser ses yeux permet de voir d’une manière surprenante dans l’obscurité.
En forêt, je passe le plus clair de mon temps à passer du mode de vision « global » que je viens de décrire, à un mode « détails ». En fait, je suis la plupart du temps en mode « global », et à chaque fois qu’un mouvement attire mon attention, je me mets en mode « détails » pour voir avec précision de quoi il s’agit. Cela me permet de repérer de nombreux animaux que je ne verrais pas autrement, et cela me permet de changer mon état d’esprit par la même occasion. En effet, ce type de vison sollicite beaucoup plus l’hémisphère droit du cerveau, qui est associé à l’intuition, à la sensibilité esthétique, et à toute une série de fonction cérébrales qui nous éloignent des fonctions logiques, et de la pensée analytique. Elles nous permettent d’entrer dans un état d’esprit très serein, très calme, proche de la méditation. Rien de bien mystique là-dedans : notre cerveau, sollicité de manière différente, se met tout simplement à fonctionner en conséquence. C’est une expérience très intéressante…
Essayez… maintenant ! ;^)
Détendez-vous, et relevez la tête. Fixez un point imaginaire dans l’espace devant vous, quelque part dans le lointain (à travers les murs, la ville, les arbres ou peu importe). Ne faites pas la mise au point. Le centre de votre vision restera légèrement flou. Puis, essayez de voir ce qu’il y a tout autour de vous. Vous verrez le monde différemment.
Ensuite, écartez les bras à 180 degrés, et faites remuer vos doigts. Vous pourrez probablement détecter un mouvement aux confins de votre champ de vision…